Grande Guerre
Un groupe de sociétés savantes mobilisé sur le projet
De 1914 à 1918, le front de l’Ouest a traversé les différentes formations géologiques du Bassin parisien, depuis les Flandres jusqu’à sa bordure vosgienne. Il revenait donc aux principales associations géologiques régionales, l’Association des Géologues du Bassin de Paris (AGBP), la Société Géologique du Nord (SGN) et le Comité français d’Histoire de la Géologie (COFRHIGÉO) de contribuer aux commémorations du Centenaire dans leurs domaines de compétence.
Le front reporté sur la carte géologique à 1/1000 000 (A. Devos et P Taborelli)
Il s’agit de souligner l’influence de la géologie sur les opérations militaires, dans le cadre d’une vision synthétique et novatrice sur l’ensemble du front pour un public francophone auquel il apportera un nouveau pan de connaissance sur le conflit et de nouvelles clés d’interprétation.
Aux territoires, il donnera de nouvelles clés d’interprétation pour le tourisme dans les carrières et autres sites de guerre, à partir du contexte géologique. Ces éléments pourront être utiles au développement touristique et au public scolaire, et ce nouvel éclairage contribuera à la valorisation du potentiel de patrimonialisation : découverte, authentification, conservation et mise en valeur des sites remarquables.
Le projet vise le large public intéressé par la Grande Guerre, auquel géologues, géomorphologues et historiens de la géologie apporteront des compléments issus de leur discipline.
Des Flandres aux Vosges, l’approche des conditions géologiques de la guerre a été variable, à la fois par le nombre de publications, de l’après-guerre comme des dernières années, et par l’état de conservation des sites où se sont déroulées les batailles. La structure géologique du front est rarement visible, à l’exception de paysages remarquables comme la crête de Vimy, de carrières utilisées comme abris, ou de tranchées creusées dans la roche dure et bien conservées.
Aux archéologues qui étudient ces sites, l’ouvrage apportera de nouvelles clés d’interprétation du contexte géologique de l'interface entre l'archéologie et les sciences de la Terre (géoarchéologie).
Il faut ajouter que les progrès techniques permettent une relance des études sur des sites jusqu’ici peu accessibles, notamment grâce aux nouveaux outils que sont les systèmes d’information géographique et la télédétection.
Dans ce contexte, les trois associations se proposent de publier fin 2017 un ouvrage présentant la géologie du front et des exemples de sites remarquables pour le rôle qu’elle y a joué, intégrant les acquis des géologues témoins de la Grande Guerre et les préoccupations les plus récentes.
Ces travaux sont dans le prolongement de l’itinéraire de tourisme de mémoire et de géologie des Flandres à la Champagne, pour lequel l’AGBP a obtenu le label « Centenaire » en 2014. En 2016 ont été organisées des journées en Champagne, et en 2017 les autres secteurs du front feront l’objet de nouvelles journées d’étude, de façon à présenter une analyse aussi complète que possible des zones de combats.
Le fort de la Pompelle sur la craie rémoise
L’ouvrage sera réalisé avec la participation d’équipes universitaires et d’organismes impliqués dans l'étude et la sauvegarde des sites de guerre d’intérêt géologique.
Le rôle de la géologie dans la guerre
La stratégie des belligérants a été marquée dès le début de la guerre par le rôle de la géomorphologie. Les auréoles concentriques du Bassin parisien, avec leurs escarpements de côtes face à l’est et défendus par les fortifications du système Séré de Rivières constituaient l’imprenable « forteresse France » que les Allemands ont dû contourner par la Belgique.
La nature géologique des terrains a également défini les conditions, favorables ou non, dans lesquelles les soldats ont creusé tranchées et sapes, selon la nature des roches et les difficultés causées par l’infiltration de l’eau, ainsi que l’aptitude à la circulation des troupes et des équipements lourds, notamment les chars.
Les carrières souterraines des régions calcaires ont offert des abris aux combattants, et la guerre des mines, qui a pris une ampleur sans précédent dans ce conflit, a été influencée, comme les autres travaux du génie, par la distribution, l’épaisseur et la structure des roches, leurs caractéristiques physiques et la présence des eaux souterraines.
La "creute" (carrière souterraine dans le calcaire lutétien) de Vingré.
Les géologues ont également été impliqués dans l'approvisionnement en eau potable et en ressources minérales nécessaires aux opérations (graphite, zinc, aluminium, combustibles…), dans l’évaluation de la qualité du béton, et dans le choix des sites stratégiques, avec les premières interprétations de photographies aériennes.
Enfin, les traces du conflit, traces dans la morphologie et zones polluées, constituent un domaine d’étude nouveau.